Josu Jon Imaz
Opinión
Le Journal du Pays Basque
La rupture du cessez-le-feu de la part d’ETA et sa volonté non équivoque d’assassiner, ce qui heureusement a été évité jusqu’à maintenant, ont envahi le langage politique basque d’expressions récurrentes. L’une d’elles, "maintenir l’initiative politique", reflet de la conviction légitime de ce que ETA ne peut pas déterminer notre agenda politique. Pour cela, nous, les partis basques, devrions prendre les initiatives pour démontrer que nous ne sommes pas immobiles et que nous allons continuer à construire le futur de ce pays malgré ETA.
ETA va déterminer l’agenda. Que cela nous plaise ou non. Dans ces moments dans lesquels l’organisation terroriste a pris la décision de faire violence à la démocratie en Euskadi, la priorité est de lui faire front. La première mesure, qui jusqu’à aujourd’hui reste la plus efficace, ne doit pas être autre que l’efficacité policière. Si ETA montre une volonté non équivoque de vouloir mettre fin à la violence, ce qui n’est malheureusement pas le cas, le recours à l’issue dialoguée retrouvera son sens. Dans les circonstances actuelles, seule l’action policière et la délégitimation sociale et politique de son entourage sont les chemins qui nous permettent de travailler pour la paix et la liberté d’Euskadi. Pourvu que d’autres temps arrivent. Mais, en attendant, reconnaissons que seul son affaiblissement opérationnel, social et politique mènera ETA à la réflexion nécessaire pour qu’elle fasse le choix de fermer définitivement sa persienne. Tout le reste n’est que volontarisme.
Malgré cela, ce pays doit continuer à vivre, à avancer, à modeler son autonomie et à se construire. ETA déterminera notre agenda politique, mais nous devons éviter qu’elle obstrue la voie démocratique. La question est comment nous avançons dans l’autonomie, dans un gouvernement autonome qui répond à la volonté démocratique des Basques et aux nécessités qu’une société moderne du début du XXIe siècle a pour développer une identité ouverte, pour améliorer sa créativité, sa compétitivité et sa qualité de vie, et pour maintenir une cohésion sociale.
EAJ-PNV a approuvé en octobre 2005 un document sur la pacification et la normalisation politique. Dans celui-ci, le pari pour le futur de l’autonomie basque a comme pierre de touche une formulation: ne pas imposer ne pas empêcher. Ces six mots résument une philosophie héritière de la meilleure tradition de pacte de l’histoire basque : pacte entre Basques pour atteindre des majorités en Euskadi supérieures à celles obtenues dans le Statut de Gernika, ce qui nous oblige à parvenir à des accords entre les différentes sensibilités et traditions politiques qui rendent possible cette majorité (ne pas imposer), et pacte avec l’Etat à travers un accord destiné à ce que, lors de sa présentation devant les Cortes, nous, les partis impliqués dans celui-ci, l’acceptions dans son intégralité (ne pas empêcher). Logiquement, après cette présentation a lieu le référendum de ratification par la citoyenneté basque. Trois principes sont ainsi respectés : le respect de la volonté démocratique des Basques, le respect de la pluralité politique de la société basque, et le principe de légalité à la base du cadre juridique en vigueur. C’est une philosophie évidemment limitative pour les uns et pour les autres.
Ne pas imposer garantit l’acceptation, par l’intégration politique, de la volonté de la société basque, mais en même temps limite la majorité nationaliste. Ne pas empêcher suppose de laisser libre cours à la reconnaissance juridique et politique des décisions adoptées, limitant par là même les majorités des partis nationaux des Cortes. Il s’agit donc d’accepter, par principe, la formule la plus démocratique et la plus large. Ceci est une voie, une méthode, dans laquelle nous pouvons et nous devons nous impliquer pour atteindre des accords politiques en Euskadi.
Pour soutenir l’initiative politique et empêcher qu’ETA ne détermine notre agenda. Comme nous le disons dans l’Accord de gouvernement que EAJ-PNV, EA et EB avons signé en juin 2005, "pour parvenir à un consensus intégrateur en relation avec les différentes visions et sensibilités politiques existantes dans la société basque sur les aspects cruciaux pour la normalisation politique". Consensus qui évidemment pourra seulement être atteint entre ceux d’entre nous qui avons un engagement ferme dans la défense de la vie humaine et qui refusons la violence comme moyen d’atteindre des buts politiques. Ainsi, oui à l’initiative politique, dans une voie d’intégration et qui nous permette de parvenir de manière effective à un meilleur niveau d’autonomie.
Le débat sur le référendum est un autre embrouillamini dans lequel nous pouvons nous perdre. Nous l’avons dit dans notre document d’octobre 2005 : "La consultation est, par conséquent, le résultat d’un processus dans lequel nous n’allons faire l’économie d’aucun effort. Ce n’est, en aucune façon, une arme de jet ni une excuse des partis pour déléguer à la société l’obligation qu’ils ont de travailler et de parvenir à un accord". La consultation a un préalable; l’accord, tel que l’Accord de gouvernement tripartite de juin 2005 l’affirme. Le référendum sera la ratification de celui-ci. Et dans les circonstances actuelles, cette condition d’accord préalable et d’intégration est le minimum démocratique exigible. Parce que nous ne pouvons pas oublier que, même si cela ne nous plaît pas, ETA est là. Observant ce que nous faisons.
Une consultation citoyenne proposée comme scénario d’accumulation de forces pour une confrontation politique est très discutable, et évidemment, contraire à l’esprit et à la lettre de la position d’EAJ-PNV exprimée dans le document d’octobre 2005. Mais dans les conditions actuelles c’est plus grave. Il peut s’agir du "plan B" auquel recourrait une ETA qui déclarerait un cessez-le-feu "permanent" comme les précédents, en attendant que la consultation soit menée. Que se passerait-il le jour suivant s’il n’y avait pas d’accord politique avec l’Etat ? Vu ce qu’il s’est passé pendant tant d’années, il n’est pas besoin d’être devin pour imaginer ETA tuant au nom de la défense d’une présumée volonté populaire non satisfaite. La conséquence de tout cela peut être diabolique. Pas en notre nom.